Exclusif : la nouvelle carte des « zones agricoles défavorisées »

Redessinée l’année dernière, la nouvelle carte de France des « zones agricoles défavorisées » (autres que les zones de montagne) – dont la dernière version datait de 1976 – est officiellement entrée en vigueur ce matin. Demandée par la Cour des comptes de l’Union européenne pour « garantir une utilisation efficace des fonds de l’Union et l’égalité de traitement pour les agriculteurs dans l’ensemble de l’Union », la révision des critères de délimitation de ces zones a déclenché l’ire d’une partie des agriculteurs et des manifestations dans plusieurs départements l’an passé. Que faut-il en retenir ?

La carte des communes classées. Avertissement : La liste donnée par le gouvernement ne tient pas compte des dernières communes nouvelles créées en 2018-2019. Cette carte ne les prend donc pas en compte.Zoomer et dézoomer avec la molette de la souris. Cliquer sur le lien en forme de chaine, en bas à droite, pour lire la carte en plein écran.

14 210 communes classées
Un chiffre pour commencer. D’après une instruction technique du 5 juin 2018, le nouveau zonage – après prise en compte du critère d’homogénéité territoriale – permet à 14 210 communes françaises d’être classées « zones agricoles défavorisées » en 2019. Ce classement accorde notamment aux agriculteurs implantés dans ces communes des indemnités compensatoires de handicaps naturels (ICHN), financées par l’État (25 %) et par le Fonds européen agricole de développement rural (75 %) dans le cadre de la politique agricole commune (Pac). C’est, selon le ministère de l’Agriculture et de l’Alimentation, 3 781 communes supplémentaires par rapport au précédent zonage. Malgré cette augmentation, « l’enveloppe des ICHN reste la même » (un peu plus d’un milliard d’euros en 2017, ndlr), alerte Pierre Morel-À-L’Huisser, député UDI, Agir et Indépendants de Lozère.
Dans le détail, 5 074 communes dites « entrantes » intègrent le dispositif : le département de la Meuse passe ainsi de zéro commune classée à 407. À l’inverse, 1 293 communes, dites « sortantes », n’en bénéficient plus. Les agriculteurs du département des Landes sont ainsi les grands perdants de la révision des critères. De 170 communes classées, le département passe à zéro. Le nombre de communes classées dans le département des Deux-Sèvres, lui aussi, se réduit comme peau de chagrin : il en comptait 177 avant la réforme, seulement 16 aujourd’hui (lire Maire info du 7 février 2018). « Pour ces sortants, les conséquences financières peuvent être dramatiques, l’ICHN constituant souvent l’essentiel du revenu dégagé sur l’exploitation », déplorait la Coordination rurale, syndicat agricole, dans un communiqué daté du 11 juin 2018.
« Des dispositions transitoires [d’une durée de trois ans, ndlr], précise toutefois le règlement européen de 2013, devraient être adoptées en vue de faciliter la suppression progressive des paiements dans les zones qui, du fait de l’application de ces critères, ne seront plus considérées comme zones soumises à des contraintes naturelles ». Une sortie « en sifflet » que confirme Pierre Morel-À-L’Huissier. Interrogé par Maire info, ce bon connaisseur du dossier estime que « des compensations de l’État » seront nécessaires « pour accompagner les agriculteurs des zones déclassées ». « Je n’ai pas encore d’information sur les intentions du gouvernement », conclut-il.

Comment expliquer ces variations ?
Le nouveau zonage est désormais soumis à des critères techniques et harmonisés au sein de l’Union européenne : ils modifient ceux qui régissaient le classement français depuis 1976.
Les « zones agricoles défavorisées » (historiquement appelées « zones défavorisées simples ») se déclinent dorénavant à deux niveaux. Avec d’un côté, les « zones soumises à des contraintes naturelles » (ZSCN). Comprenez « lorsqu’au moins 60 % de la surface agricole remplit au moins l’un des critères » biophysiques (températures basses, sécheresse, excès d’humidité des sols, forte pente…) largement détaillés dans le règlement européen de 2013 (à télécharger ci-dessous). L’indicateur principal à utiliser étant celui de la production brute standard (PBS).
De l’autre, les « zones soumises à des contraintes spécifiques » (ZSCS) comprennent, selon le règlement européen, « les surfaces agricoles dans lesquelles les conditions naturelles de production sont similaires et dont la superficie totale ne dépasse pas 10 % du territoire de l’État membre concerné ». Pour ces zones-là, les marges de manœuvre de chaque État sont légèrement plus importantes. La France a ainsi choisi de privilégier les « contraintes spécifiques » suivantes : « élevage extensif » (critères « autonomie fourragère » et « polyculture – élevage ») et « environnement – paysage » (critères « haies », « parcellaire morcelé », « surfaces peu productives », « zones humides », « déprise agricole » et « insularité »).
Enfin, le critère de l’homogénéité territoriale a aussi été appliqué : il s’agissait, en résumé, d’assouplir certains critères de classement en ZSCS pour « les enclaves de moins de 10 communes ». Ceci permettant de classer 77 communes supplémentaires.
Pour rappel, les « zones de montagne » (« zones de haute montagne », « de montagne », « de montagne sèche » et « de piémont ») ne sont pas concernées par ce nouveau zonage.

Ludovic Galtier

Télécharger la carte des « zones agricoles défavorisées ».
Télécharger la liste des communes.
Télécharger le règlement de l’Union européenne.
Télécharger l’arrêté et le décret.


© sources : Mairie Info (www.maire-info.com) – 29/03/2019