Les dossiers de la rentrée pour les intercommunalités

Nouveau quinquennat oblige, la rentrée est très chargée pour les collectivités territoriales et les intercommunalités. Au programme : les chantiers financiers et fiscaux, avec le projet de loi de finances pour 2018 présenté en conseil des ministres le 27 septembre, et une série de réflexions et de groupes de travail lancés pour aboutir à des annonces lors de la deuxième Conférence nationale des territoires qui doit se tenir le 2 décembre. Mais il y a aussi beaucoup d’autres sujets qui concernent et impactent les intercommunalités : la baisse des contrats aidés, la préparation d’un nouveau projet de loi « logement », le projet de loi relatif au droit à l’erreur et à la simplification administrative examiné prochainement en conseil des ministres, la création d’une agence nationale de la cohésion des territoires, etc.

Baisse des contrats aidés : le casse-tête de la rentrée scolaire

Le 8 août dernier, l’AMF alertait le gouvernement sur les inquiétudes des maires et présidents d’intercommunalités concernant la baisse, sans préavis, des contrats aidés, sachant que ces emplois interviennent dans de nombreux services publics et particulièrement la mise en oeuvre des activités périscolaires. Suite à la montée du mécontentement, le gouvernement a reçu le 1er septembre, une délégation d’élus, dont l’AMF, et s’est engagé à traiter toutes les situations locales, au cas par cas, en donnant une certaine latitude aux préfets. Les représentants des associations du bloc communal demandent « instamment au gouvernement de revoir le nombre de contrats aidés en 2017 et de régler, sans délai, toutes les situations locales pour permettre la rentrée scolaire dans les meilleures conditions ».

Rappelons que sans le recours à ce dispositif, la majorité des communes et intercommunalités ne peut pas maintenir dans leur emploi les personnes en contrat aidé, vu le contexte budgétaire actuel.

Suppression de la taxe d’habitation

Sur le sujet très sensible de la suppression de la taxe d’habitation (TH) pour 80% des ménages, Emmanuel Macron a confirmé, lors de la Conférence nationale des territoires (CNT) du 17 juillet, que la réforme serait lancée dès 2018, et se ferait sur trois ans, promettant que le manque à gagner pour les communes serait compensé à l’euro près. Pas de quoi rassurer les élus vu les précédents. Matignon a précisé, le 24 août, que la baisse de la TH serait de 30% dès 2018. On en saura plus lors de la présentation du projet de loi de finances pour 2018 qui sera présenté le 27 septembre en conseil des ministres.

Le ministre de l’Action et des Comptes publics, Gérald Darmanin, a indiqué vouloir « apporter aux collectivités des recettes équivalentes », au-delà de la question de compensation et des dégrèvements « qui aura lieu l’an prochain ».

Un pacte financier signé en fin d’année

Au-delà, le gouvernement veut procéder à une révision complète des ressources des collectivités. « Le pacte financier doit être l’occasion de sécuriser les contributions des collectivités au redressement des comptes de la nation », a promis Gérald Darmanin. Ce vaste chantier mobilisera une grande partie de l’automne. Un groupe de travail se penchera notamment sur la trajectoire des dépenses publiques et les moyens de réduire les dépenses de fonctionnement. De plus, l’Observatoire des finances et de la gestion publique locale devra « réaliser une revue des dépenses locales ». Au menu de la deuxième CNT qui devrait se tenir le 2 décembre : la signature du pacte financier pluriannuel entre le gouvernement et les collectivités.

Une baisse drastique des dépenses de fonctionnement

La méthode n’est plus à la baisse uniforme des dotations, comme lors du précédent quinquennat, le gouvernement laissant le soin aux collectivités de s’organiser elles-mêmes pour diminuer la dépense locale qui atteindra pas moins de 13 milliards d’euros jusqu’en 2022. Mais il leur est demandé de réduire fortement leurs dépenses de fonctionnement dès l’an prochain. A défaut, « il y aura une correction », a prévenu le président de la République. En clair, il n’y aura pas de baisses des dotations dans le projet de loi de finances pour 2018, mais elles pourront revenir dès 2019 ! Les modalités d’application de cette baisse drastique n’ont pas été précisées pour l’instant. La réponse du gouvernement se limite surtout à promettre un renforcement de la lutte contre l’inflation normative. Utile mais loin d’être suffisant.

Par ailleurs, le chef de l’Etat ne veut pas lancer « une énième tentative » de réforme des valeurs locatives – « des batailles qui ont déjà été perdues » – tout en promettant de garantir « l’autonomie fiscale » des communes en leur attribuant une part des recettes de la CSG et de la CRDS dans le cadre d’une réforme globale de la fiscalité locale.

Annulation de crédits

La satisfaction exprimée par les élus sur la méthode exposée lors de la CNT n’a pas tenu très longtemps avec la publication le 20 juillet du décret d’avance détaillant les ouvertures et annulations de crédits pour 2017 avec la suppression de pas moins de 260 millions d’euros de la DETR (dotation d’équipement des territoires ruraux) et de la DSIL (dotation de soutien à l’investissement public local). Les élus ont dénoncé une décision prise sans aucune concertation, loin des engagements exposés le 17 juillet.

Parmi les victimes de cette coupe budgétaire : les crédits « politique de la ville ». Concrètement, le décret annule 130,4 millions d’euros en autorisations d’engagement (AE) et 46,5 millions d’euros en crédits de paiement (CP). Ces annulations impactent directement la mise en oeuvre des 435 contrats de ville (1514 quartiers les plus pauvres avec 5,5 millions d’habitants).

Coup de pouce aux communes nouvelles

Edouard Philippe comme Emmanuel Macron affirment vouloir développer encore les communes nouvelles. Mais sans donner plus de précisions, notamment sur la remise en place ou non d’un dispositif d’incitation financière. Réponse lors de la présentation du projet de finances pour 2018.

Concertation sur un projet de loi « logement »

Le ministère de la Cohésion des territoires a lancé, début août, une consultation en ligne auprès des acteurs du logement. Objectif : « faire remonter les propositions d’amélioration et de simplification des professionnels du secteur, associations et élus ». Le questionnaire s’appuie sur six axes :

-accélérer la production de logements dont sociaux en zone tendue,

-répondre à la demande de logements dans les territoires détendus,

-faciliter l’acte de bâtir en simplifiant les normes de construction et les procédures et en développant le numérique,

-promouvoir la rénovation énergétique des logements, en priorité ceux des ménages modestes, -faciliter l’accès au logement et le parcours résidentiel des ménages, en particulier jeunes,

-développer l’insertion par le logement d’abord.

La consultation sera close le 10 septembre. Les contributions doivent alimenter un futur projet de loi. Mais aucune date n’est annoncée pour l’instant. Concernant un éventuel assouplissement de la loi SRU, le ministère indique juste qu’il tiendra compte des avis de la commission nationale présidée par Thierry Repentin.

Au final, la seule certitude est une communication en conseil des ministres sur la « stratégie logement » qui doit avoir lieu courant septembre.

Simplification administrative

Un projet de loi relatif au droit à l’erreur et à la simplification administrative doit être présenté prochainement en conseil des ministres. Très dense, il comportera un volet de dispositions concernant les collectivités. Assez critique sur ce texte, le Conseil national d’évaluation des normes (CNEN) a émis un avis défavorable (www.cnen.dgcl.interieur.gouv.fr/documents/…/delibs-seance-200717.pdf), le 20 juillet, regrettant notamment qu’il n’y ait pas eu une « concertation préalable approfondie » avec les associations d’élus locaux.

Parmi les dispositions, il est prévu une réduction des actes des collectivités soumis au contrôle de légalité : délibérations sur le domaine public, la voirie communale, les montants des redevances d’occupation, la création de régies, etc. Autre mesure : le report de la première échéance pour la rénovation thermique des bâtiments publics à 2030. On peut aussi citer la mise en place obligatoire pour les collectivités d’une solution de paiement en ligne pour les usagers. De quoi améliorer la qualité de service et faire des économies en matière de recouvrement, mais cela risque aussi « d’entraîner des coûts importants de mise en œuvre pour les petits services publics locaux gérés en régie, tels que les services eau et assainissement ».

Une Agence nationale de la cohésion des territoires

Autre annonce d’Emmanuel Macron lors de la CNT : la création d’une Agence nationale de la cohésion des territoires. Se voulant sur le modèle de l’Anru, elle serait destinée à lutter contre les fractures territoriales en apportant un appui en matière d’ingénierie publique surtout pour les zones rurales. Il s’agirait d’une sorte de guichet unique en matière de développement local et d’accès aux dispositifs existants. Mais pour l’instant pas de précisions sur le mode d’emploi, les moyens et le calendrier.

Par ailleurs, le président de la République a annoncé un moratoire sur la fermeture des services publics en milieu rural, et notamment l’arrêt de la fermeture de classes dans les écoles. S’y ajoutent un « doublement » du nombre de maisons de santé dans les territoires ruraux et un assouplissement du numerus clausus des étudiants en médecine.

Couverture numérique

Lors de la CNT, le chef de l’Etat a aussi promis une couverture intégrale du territoire en haut ou très haut débit « d’ici 2020 ». Une revendication forte des associations d’élus locaux. Une bonne nouvelle en apparence car cela ferait gagner deux ans sur le Plan France très haut débit (PTHD) mais on parle à présent aussi de « haut débit »…


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© sources : AMF France (www.amf.asso.fr) – 04/09/2017

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