Les maires du Var votent une motion en faveur du retrait de la réforme des rythmes scolaires

Réunis en Assemblée Générale le 26 Avril dernier, les maires et présidents d’EPCI présents ont soutenu une motion en faveur du retrait de la réforme des rythmes scolaires. Sur les 132 élus présents ou représentés, 3 se sont abstenus et 4 ont voté contre. L’adoption de cette motion a été précédée d’un débat au cours duquel les élus ont pu partager leur ressentiment sur les difficultés qu’ils rencontrent pour mettre en place le dispositif à la rentrée 2014. La motion a été adressée au Ministre de l’Education Nationale, M. Benoit HAMON.

Les maires sont favorables à une réforme… mais pas celle là ! 

La réforme préoccupe un certain nombre de maires au moment où ils préparent et votent leurs budgets. Quelques jours avant l’assemblée de l’AMF83, plusieurs d’entre eux ont manifesté publiquement leurs inquiétudes par voie de presse, comme Monsieur Hubert FALCO, Sénateur Maire de Toulon, Monsieur  Robert BENEVENTI, Maire d’Ollioules ou Monsieur Marc VUILLEMOT, Maire de La Seyne-sur-Mer

Dans le Var, seules 13 communes se sont déterminées pour adopter le dispositif à la rentrée 2013 : « Si la réforme avait été mieux faite, peut-être aurait-elle été appliquée plus facilement et mieux acceptée, à la fois par les élus, les enseignants, les parents d’élèves et les personnels encadrants », a indiqué M. Jean-Pierre VERAN, Président de l’Association des Maires du Var, Maire de Cotignac : « Des avancées ont été faites mais dans les petites communes, partout en France, l’application de la réforme pose des problèmes sur le plan financier et sur le plan du recrutement d’animateurs et de personnels qualifiés. Le temps consacré au périscolaire mobilise nos agents communaux et reste coûteux malgré la promesse du versement d’un fonds d’amorçage et d’une allocation de la CAF. »

Marc VUILLEMOT, Maire de La SEYNE-SUR-MER: Une réforme qui « démantibule lourdement le dispositif existant »
« Je crois qu’il ne doit pas se trouver parmi nous un maire qui ne découvre pas la complexité de la réforme mise en œuvre. Ce dispositif, pour moi, est fondé. On est tous d’accord pour dire que les journées scolaires sont longues et que les années scolaires sont les plus courtes de toute l’Europe. On peut peut-être voir un lien de cause à effet entre cette réalité et les écarts qui se creusent dans les résultats scolaires des petits Français et ceux des autres pays. Je partage l’analyse sur la difficulté budgétaire, qui prend un caractère encore plus compliqué lorsqu’on la met en parallèle avec la baisse, lourde, des dotations de l’Etat. Celles que nous vivons cette année et les suivantes, car si j’ai bien compris, sur les 50 milliards d’économies que l’Etat va réaliser, les collectivités locales seront impactées à hauteur de 11 milliards. (…) A La Seyne, la mise en place de la réforme va représenter 800 000 euros, à minima, pour la commune, tandis que nous allons devoir supporter 1 million d’euros de moins de dotation globale de fonctionnement. Donc, oui, en effet, l’exercice est complexe de ce point de vue-là. Son organisation l’est également : La difficulté de trouver des ressources humaines compétentes, formées, voir expérimentées est réelle, car il ne s’agit pas de faire de la garderie. En terme d’organisation, cela va démantibuler lourdement le dispositif existant (…). Certes, la proposition de Benoit HAMON de déplacer les temps périscolaires sur une demi journée tend à contenir une certaine désorganisation mais reste difficile à faire entendre à nos personnels et aux familles, car si on veut pouvoir répondre à tous leurs besoins, il faudrait d’ores et déjà doubler les personnels. Alors, oui, je suis de ceux qui disent que cela est difficile mais je suis aussi de ceux qui pensent qu’il faut avancer vers une réforme de ces différents temps de vie des enfants ».

Retour vers la case départ ?

Gérald PIERRUGUES, Maire de CLAVIERS :  » Si c’est pour faire de la garderie, j’en ai déjà une ! »
« En tant que Maire d’une toute petite commune rurale, outre l’aspect financier qui existe, je pense que la grosse difficulté sera de trouver des activités pour les enfants, car si c’est pour faire une garderie, j’en ai déjà une, et elle me coûte suffisamment cher. Donc je ne vois pas l’intérêt de cette réforme. Sur place, nous n’avons pas d’activités ou de lieux spécifiques comme des théâtres etc… Donc comment devrons-nous procéder? Amener nos enfants dans les villes ? Les coûts de transports seront très élevés. A moins que nous puissions bénéficier de nouvelles aides… »

Nello BROGLIO, Président de l’Association des Communes Forestières du Var, Maire des Adrets de l’Esterel : « En somme, avec les nouvelles promesses d’aménagement annoncé par le Ministre, on revient en arrière ! »
« La proposition du Ministre de regrouper tous les temps périscolaires sur une demi journée m’interpelle un peu. On nous dit que nos gamins ne pouvaient pas travailler convenablement donc on nous explique qu’il faut passer à quatre jours et demi. Si maintenant, cette demi-journée est banalisée pour le périscolaire, on revient à 4 jours. En somme, avec les nouvelles promesses d’aménagement annoncé par le nouveau Ministre, on revient en arrière. Pour ma part, je suis favorable à un report de cette réforme dans le temps de façon à ce que nous puissions réfléchir correctement »


Christiane HUMMEL, Sénateur-Maire de La VALETTE : « Si on nous avait donné le temps, je suis sûre que la réforme serait beaucoup mieux. »
« Je suis un des maires qui s’est prononcé contre la réforme et aujourd’hui, lorsque je lis dans votre motion que vous demandez le report de la réforme en 2015, c’est se donner un sursis… pour mieux sauter. Moi je proposerais plutôt de dire : on arrête cette réforme là. S’il faut faire une réforme, on se met tous autour d’une table, on ouvre la concertation mais on arrête la réforme. Faire des petites expériences par ci par là nous coûtera cher. Nous ne sommes pas opposés à une réforme en général mais nous n’avons pas pu en discuter au Parlement ni en commissions. Si on nous avait donné le temps, je suis sûre qu’elle serait beaucoup mieux. »

 Vincent MORISSE, Maire de SAINTE-MAXIME : « Est-ce que l’avenir de nos enfants dépend vraiment de cette réforme? »
« Je suis d’accord avec notre Sénatrice. Je suis pour l’annulation de la réforme et non pas pour son report d’un an. Cela n’apportera pas plus de solutions. En tant que maire, j’ai le sentiment qu’on passe à côté de la plaque. Dans le monde dans lequel nous vivons aujourd’hui, l’économie, les chiffres du chômage nous font nous interroger : est-ce que l’avenir de nos enfants dépend de cette réforme? Je n’y crois pas du tout ! Je pense qu’il y a d’autres difficultés ».

Christian DAVID, Maire de CARNOULES: « Cette réforme n’a pas fait la démonstration d’un gain particulier pour l’enfant »
Je demande également que la réforme en l’état soit retirée. Qu’il y ait à la place une discussion, une volonté de partager, une amélioration de l’activité éducative. La première mouture de la réforme s’est faite sans aucune concertation. On nous annonce une légère évolution avec un décret qui est à la signature, sans aucune concertation à nouveau, ce qui paraît inadmissible. Cette réforme n’a pas fait la démonstration d’un gain particulier pour l’enfant. En revanche, elle modifie le fonctionnement de notre société au regard des parents d’élèves qui s’insurgent et qui se demandent comment ils vont pouvoir gérer leurs enfants en dehors de l’Education Nationale. »

Catherine ALTARE, Maire de PUGET-VILLE :« Un transfert de compétence déguisé »
« Cette réforme, ce n’est ni plus ni moins qu’un transfert déguisé de compétences de l’Etat vers les communes. On ne nous demande pas de faire de la garderie mais bien de fournir un projet éducatif. Je suis donc également contre cette réforme ».

L’égalité des chances en question 

Horace LANFRANCHI, Président du Conseil Général du Var : « C’est le premier pas d’une quasi-privatisation de l’école de la République ».

« Mes chers collègues, je ne vais pas reprendre les arguments qui ont été avancés car ils me conviennent tous. Mais j’ai proposé lors de la dernière séance plénière du Conseil Général de demander au service juridique de notre Assemblée de vérifier si les lois organiques de création des écoles publiques ne sont-elles pas dévoyées dans cette action là. Car l’Etat s’occupe de la partie pédagogique tandis que les collectivités, c’est la construction des écoles et la mise en place de quelques matériels qu’elles mettent à la disposition des enfants. Jusqu’à présent, cette répartition fonctionnait plutôt bien. Or, cette fois ci, on nous demande de prendre en charge la partie pédagogique qui est du ressort de l’Etat. C’est le premier pas d’une quasi-privatisation de l’école de la République. Pour quand l’enseignement du Français et des Mathématiques à la charge des communes ? Notre Ecole est née de la République. Hormis les aspects financiers, qui sont colossaux, cette réforme risque de nous mener à deux formes d’enseignements : un enseignement pour les communes qui sont un peu plus aisées, et un enseignement pour les communes qui ne le sont pas du tout. Nous devons nous opposer fermement à ce décret qui est mal ficelé, mal fagotté et fait dans l’urgence. Il nous faut demander l’annulation de ce décret, tout simplement ».

Pierre-Yves COLLOMBAT, Sénateur du Var, Président de l’Association des Maires ruraux du Var : « Sur le plan pratique, ça coince ! »
« Pas plus que je n’étais favorable à l’institution du service municipal d’accueil des élèves en cas de grève des enseignants, je ne suis favorable à cette réforme. Sur le plan pédagogique, il est peu probable que ce genre de réforme améliore significativement le fonctionnement de notre système scolaire. Le désordre ne date pas d’aujourd’hui. M. DARCOS avait déjà en son temps, sans demander l’avis de personne, supprimer l’école le samedi matin. Mais maintenant, qu’est-ce qui va se passer?  On verra les gamins qui pourront partir chez eux, parce que leurs parents travaillent pas etc…Et puis il y aura les autres ! Bien entendu, on ne va pas les mettre dans la rue. Certains collègues maires, parce qu’ils y ont réfléchi depuis longtemps, ont mis en place un certain nombre d’activités périscolaires et non pas scolaires. Mais tous les autres, qui ont financé d’autres opérations, se retrouvent face à un sacré problème ! Ces élus, aujourd’hui, sont majoritaires et sur le plan pratique, ça coince !  Il faut impérativement trouver des solutions, notamment sur le plan financier ».

Annie CHARRIER, Maire de TAVERNES : « Un problème d’égalité des chances pour les enfants ! « 
« Personnellement, je suis pour la réforme, mais pas celle là. Je suis pour une réforme parce que cela fait des années que des professionnels travaillent sur ces questions de rythmes scolaires. Des études ont été faites, ont été rendues. On n’en a peu ou pas parlé. Nous n’avons jamais été concertés sur ces questions. Il me semble qu’il y a un problème d’égalité des chances pour les enfants. Si on ne fait pas attention, on n’aura plus une école de la République. On aura une école par quartier, par ville, par village. Tous les petits varois doivent pouvoir avoir la même chance d’accéder à l’Ecole de la République ». 

Pierre GAUTIER, Maire de FORCALQUEIRET : « Les parents d’élèves nous demandent des comptes ! « 
« La réforme doit être mise en place en Septembre. Nous avons avancé sur la mise en œuvre. Aujourd’hui, on se sait pas si elle va être amendée, si elle va être annulée, mais en revanche, les parents d’élèves nous demandent des comptes. On va devoir signer des conventions avec des organismes, on va devoir embaucher des gens, et ce n’est sûrement pas en Juillet / Août qu’on va le faire. Il y a une nécessité d’urgence pour que nous puissions répondre aux parents et aux enseignants ». 

Christine AMRANE, Maire de COLLOBRIERES : « Pas de consensus pour travailler ensemble »
« Sur la commune, nous avons fait le choix de mettre en place la réforme des rythmes scolaires en 2013. Constat avait été fait que nous avions un manque d’activités périscolaires. On a donc souhaité mettre en place ce temps périscolaire en travaillant étroitement avec les associations. Je reconnais que la réforme est très complexe. Il n’y a pas eu, de la part de l’Education Nationale, un consensus suffisant pour pouvoir travailler ensemble. Il n’empêche qu’aujourd’hui, le résultat est largement satisfaisant. Quand on a la chance de pouvoir héberger du périscolaire pour les enfants, c’est une chance pour eux. Néanmoins, dans la mesure où la mise en place de ce dispositif reste compliquée, je suis solidaire de cette motion ».

Michel TOSAN, Maire de BAGNOLS : « la mise en place de la réforme n’est pas « pas chère » »
« Oui, en effet, la mise en place de la réforme n’est pas « pas chère ». Néanmoins, je suppose que mes petits-fils n’auront pas de soucis à s’insérer dans cette société. Ils vivent dans un jus culturel, des parents, des grands parents, tout à fait positif. La reproduction sociale se fera facilement et l’école permet à ces enfants de voguer facilement vers les sommets de la formation. Mais qu’en sera-t-il pour les autres? (…) Dans ma commune, nous avons tenu un conseil d’école avec les parents, les enseignants et les personnels encadrant pour résoudre le problème du mercredi. A Bagnols, il y a 206 enfants en classe. 95% des enfants suivent le périscolaire. Les parents n’ont pas forcément les moyens de faire autrement. Nous n’avons pas les moyens des grandes communes. Tous ces aménagements coûtent beaucoup à la commune… mais nous avons des résultats. Madame La Rectrice est venue observer comment nous fonctionnions. J’invite d’ailleurs mes collègues à venir voir, eux aussi, comment ça se passe à Bagnols. Alors oui, c’est vrai, les rythmes scolaires coûtent, mais les ronds-points coûtent aussi, les déchets coûtent encore plus… et bien plus chers que les rythmes scolaires ! ».

Jean-Pierre GIRAN, Député-Maire de HYERES:
« 
Il faudrait que la loi soit une proposition à options. »
« Je ne crois pas qu’il y ait ici un maire qui ne souhaite pas améliorer le système scolaire actuel. Nous pouvons avoir des divergences mais nous avons tous le soucis de l’accès à la vie future pour nos enfants. Je salue celles et ceux parmi les maires qui ont fait l’effort de mettre en place ces formalités. Dans notre pays, on a une fâcheuse tendance à penser que tout doit pouvoir s’appliquer partout de la même façon. Cela me rappelle un peu les 35 heures, quelles que soient les entreprises, leur localisation, leur fonctionnement… partout, la même norme !
Je ne sais pas s’il faut ou pas supprimer la loi. Mais pour satisfaire le Ministre, ceux qui trouvent la réforme opportune ou pour ceux qui la trouvent nocive, il faudrait que la loi devienne une proposition à options. Ce ne serait pas une expérimentation, ce serait une opportunité qui pourrait être saisie – ou non – parce qu’un maire peut décider que, sur un territoire donné, il y a mieux à faire que d’appliquer cette réforme qui va perturber les transports publics, rendre difficile les vies de famille. Je demande donc que cela soit une loi à option ».

Hubert FALCO, Sénateur Maire de TOULON : « Vraiment, cette réforme n’est pas opportune! »
« Avec cette réforme, on est très loin de ce qui nous rassemble… à savoir l’école de la République. Et cette école est fondée sur l’égalité. Je ne suis pas d’accord sur la différence que l’on dit constater entre les enfants des villes et les enfants de la ruralité. Moi je suis un enfant de la ruralité et il ne m’a rien manqué. Cette école de la République ne doit pas être traitée au cas par cas. Or, au moment où notre pays est en difficulté, on nous impose une loi que personne ne souhaitait. Bien sûr, on se doit de penser à l’éducation de nos enfants. Dans ma commune, j’ai mis en place le périscolaire pour 15000 élèves, avec 85 écoles primaires et maternelles. 1500 agents sont mobilisés. Au total, la commune a déboursé 3,2 Millions d’euros, alors que sur les deux derniers exercices, la DGF a baissé de 4 millions d’euros. Et en plus, on me demande de mettre en place une réforme que personne ne veut, ni les parents, ni les enseignants, et qui va nous couter 1,2 millions d’euros.
Vraiment, cette réforme n’est pas opportune. La mettre en œuvre par décret alors que l’on demande à tous les français de faire des efforts n’est vraiment pas raisonnable. Je souhaite qu’elle soit tout simplement retirée ».