Alors qu’un nouveau rapport Lambert sur la simplification des normes était rendu public le 13 septembre dernier (lire Maire Info du 14 septembre), le Conseil national de l’évaluation des normes (Cnen) se penchait sur un projet de décret à contre-courant de l’esprit du jour… Car ajoutant encore aux contraintes réglementaires des collectivités.
Soumis à consultation publique jusqu’au 12 octobre, ce projet de texte vise à mettre en conformité le droit interne relatif à l’évaluation environnementale (EE) des documents d’urbanisme avec le droit européen – en particulier la directive 2001/42/CE du 27 juin 2001. Deux changements réglementaires sont à prévoir, avec de fortes incidences pour les collectivités. Le premier est simple, mais non sans contrainte : les procédures d’élaboration et de révision des plans locaux d’urbanisme (PLU) devront systématiquement être soumises à EE. Jusqu’ici, une simple évaluation au cas par cas était requise pour ces procédures. Autre nouveauté : le projet de texte crée un dispositif ad hoc d’examen au cas par cas pour les procédures d’évolution (modification, mise en compatibilité) des PLU et des schémas de cohérence territoriale (Scot), et pour les cartes communales.
Si la première exigence découle d’une jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE, 21/12/2016, n° C- 444/15), la seconde est le résultat d’un arrêt du Conseil d’Etat du 19 juillet 2017, qui a partiellement annulé certaines dispositions du Code de l’urbanisme, issues du décret n°2015-1783 du 28 décembre 2015. Motif ? Le dispositif ne prévoyait pas d’EE en cas de modification ou de mise en compatibilité d’un document d’urbanisme, alors même que ces procédures peuvent avoir « des incidences notables sur l’environnement ». Une mauvaise transposition de la directive de 2001, selon le requérant, l’association France Nature Environnement, confortée par la décision de la Haute Juridiction.
Tenu de combler ce vide juridique, le ministère de la Cohésion des territoires avait déjà soumis un premier projet de texte au Cnen qui, le 26 juillet dernier, avait rendu un avis défavorable. Dès l’origine, le projet de décret excluait certaines procédures dites de « modification » au sens du droit interne (rectification d’erreur matérielle, réduction de zones urbaines ou à urbaniser) du champ de l’évaluation systématique. La nouvelle mouture du texte tient compte des remarques et propositions de l’AMF, destinées à éviter l’écueil de la sur-transposition, et à garder toute proportion au regard des enjeux de la directive de 2001. En particulier, les délais de saisine de l’autorité environnementale (AE) sont mieux encadrés : dans le cadre du dispositif ad hoc « au cas par cas », les demandes de pièces complémentaires (qui seront listées par un formulaire Cerfa, autre garantie obtenue) devront être formulées par l’AE dans les 15 jours suivant sa saisine. Le délai de réponse de l’AE dans le cadre de cette procédure – deux mois – est donc un délai maximal.
Et si le ministère met en avant, à travers ce dispositif, une responsabilisation des collectivités pour s’adapter au « caractère décentralisé des documents d’urbanisme », la présentation du coût de la réforme pour ces dernières est plus lacunaire : 3 407 4500 euros annuels. Il faut dire que la marge de manœuvre est infime. Quelle que soit la rédaction finale du texte, les collectivités resteront tenues de s’auto-évaluer en déterminant si « l’évolution projetée est susceptible d’avoir des incidences notables sur l’environnement », et si elle doit alors faire l’objet d’une EE. De même qu’en la matière, l’AE aura toujours le dernier mot.
Consulter le dossier de présentation de la consultation publique.
Consulter l’arrêt du Conseil d’Etat du 17 juillet 2017 (n° 400420).
© sources : Maire Info (www.maire-info.com) – 19/09/2018