Ce n’est pas encore acté, mais c’est tout comme : la préservation des espaces agricoles et la reconquête du foncier ne pourront désormais s’envisager qu’à l’échelle des territoires, en parfaite cohérence avec les documents d’urbanisme et en dehors de toute pression ou de toute spéculation.
Pour Jean-Pierre Véran, président de l’Association des Maires du Var, la gestion du foncier agricole doit rester une préoccupation importante pour tous les maires qui engagent leur responsabilité sur tous les dossiers liés à l’aménagement de l’espace, au foncier, à l’urbanisme, aux permis de construire. « Avec ce document réalisé par la Chambre d’Agriculture, je crois que nous allons pouvoir travailler sur de nouvelles bases et nous engager durablement pour que l’agriculture varoise reste performante, identitaire et variée ».
Une démarche partenariale
En 2005, la signature de la charte pour une reconnaissance et une gestion durable des territoires départementaux à vocation agricole avait permis de lancer une réflexion cohérente sur la gestion des espaces agricoles. La démarche avait consisté à faire aboutir des décisions stratégiques décidées dans l’intérêt supérieur des territoires, toutes élaborées sur la base d’un exercice de prospective ancré dans une logique de débats participatifs. Cinq ans plus tard, au delà de l’inventaire des revendications recueillies au cours des différents échanges entre les partenaires concernés, le livre blanc des moyens d’actions sur le foncier agricole déploie des plans d’actions et une méthodologie fondés sur cinq grandes « familles d’outils » : des outils de planification en vue de stabiliser le foncier, des outils de restructuration en vue d’une optimisation de l’outil de production (foncier), des outils de gestion et de mise en valeur du foncier, des outils de préservation, plus spécifiquement de préservation des espaces sous pressions, et enfin des partenaires fonciers.
Josette Pons, vice-Présidente du Conseil général et Présidente de la commission départementale d’agriculture a salué le dynamisme des élus de la chambre d’agriculture du Var et la détermination des agriculteurs, « sans lesquels rien ne pourrait se faire ». Elle a rappelé les engagements du Département en faveur des espaces agricoles et confirmé les modalités d’intervention territoire par territoire : procédures, aides financières directes, aides à la préservation du foncier agricole, accompagnement dans l’échange amiable de terrains agricoles :« Le Conseil Général est partenaire du livre blanc. Les maires et représentants des chambres consulaires peuvent compter sur l’appui du Département pour les soutenir dans leurs projets d’aménagement ou de récupération du foncier agricole ».
Depuis qu’il préside la Chambre d’Agriculture, Alain Baccino se fait fort d’aborder toutes les problématiques du monde agricole sur un mode offensif : » Offensif, ça veut dire quoi ? Ca veut simplement dire qu’on n’est plus sur la défensive, ça veut dire qu’on avance avec des propositions et qu’on se fait entendre. Avec ce document, nous nous donnons les moyens d’agir. Nous travaillons sur du concret. On connait les problèmes, on sait les solutionner, on peut initier des démarches, on sait apporter une expertise. Dans ce livre blanc, nous recensons tous les moyens qui permettent d’agir durablement et directement sur les territoires à vocation agricole. Ce n’est pas un document coercitif. C’est un document technique, mis à la disposition des personnes publiques ou privées compétentes en matière de gestion du foncier agricole qui veulent que les choses changent et qui souhaitent que l’agriculture varoise perdure ».
S’entourer de garanties
A la tribune, le président de la Chambre a espéré que les maires plébiscitent ce livre blanc et restent convaincus de la nécessité de conserver un pourcentage minimum de terres agricoles dans leurs PLU, selon des modalités identiques à la protection offerte aux espaces boisés, au delà des 12% actuellement garantis.
Et très vite, après la présentation sommaire du livre blanc par diaporama, les élus ont demandé la parole dans la salle.
Jean-Michel Huguet, premier adjoint au Maire d’Ollioules, a souhaité connaître la position du Département sur la préservation des périmètres des espaces agricoles péri-urbains. Josette Pons lui a répondu que le Conseil Général n’a pas vocation à passer en force: « Nous avons certes une politique d’aménagement définie mais si la commune n’est pas d’accord, le Conseil général ne va pas venir dire: ici je vais faire un PAEN, et c’est comme ça. C’est même l’inverse qui se passe, puisque nous travaillons désormais à l’échelle des territoires, en concertation et en partenariat. »
Selon Alain Baccino, la reconquête de terrains dédiés à l’activité agricole ne se fera « que si on arrive à prouver que nous accompagnons de véritables projet d’essor économique de nos filières. (…) Mais je peux vous assurer que les exploitants et les producteurs, toutes filières confondues sont déterminés à démontrer que l’agriculture varoise est comptable et responsable, et qu’elle n’encourage que les vrais projets. »
Sur ce point, Jean-Pierre Véran a invité les maires à faire preuve de prudence et de ne pas hésiter à intervenir juridiquement lorsque la vocation agricole des terres est dévoyée : « Nous devons nous entourer de garanties lorsque des aides publiques sont données à ceux qui veulent s’installer sur des terres agricoles. Je pense même qu’il serait prudent de faire inscrire systématiquement une hypothèque légale au profit des partenaires de la charte des territoires agricoles, de façon à ce que nous puissions agir dès lors que nous constatons que les aides sont détournées au profit d’une occupation non conforme à un projet d’exploitation agricole« .
Claude Cheilan, Maire de Vinon-sur-Verdon, a indiqué qu’il existait au sein de la Chambre d’Agriculture du Var une commission d’experts capable d’examiner les dossiers déposés par les exploitants : « Seuls les pros peuvent dire si les projets déposés sont viables ou pas. Leurs avis sont sûrs. Ils font la différence entre les vrais et les faux projets, et nous permettent d’éviter le projet de détournement de l’impossibilité de construire en terre agricole initié par des exploitants peu scrupuleux ».
Avec ou sans friches
L’insécurité foncière, l’élévation du prix des terrains et les pratiques spéculatives qui s’y jouent sont incompatibles avec la poursuite d’une activité agricole stable, pérenne et durable. L’utilisation de la location verbale en lieu et place du bail agricole s’y développe. Les friches s’installent. Christophe Kasperski , adjoint au Maire de Solliès-Pont a cherché a savoir dans quelle mesure il ne serait pas possible de contraindre les agriculteurs à cultiver coûte que coûte leurs terrains, quitte à faire inscrire cette obligation noir sur blanc dans les PLU.
Alain Baccino a répondu que cette obligation n’était pas généralisable, dans la mesure où certains élus manifestent encore des réticences à ces procédures qu’ils jugent « trop contraignantes » et qu’ils souhaitent pouvoir dénoncer rapidement au cas où une entreprise manifesterait un intérêt à créer des emplois sur de tels espaces : « Certes, cette attitude compréhensible ne doit pas empêcher la mise en place de réserves foncières dédiées à l’agriculture ».
Il reste que la longueur des procédures de requalification (ou de changement de destination) des terrains agricoles reste encore trop dissuasive. Comme l’a expliqué Nello Broglio, Maire des Adrets et Président de l’Association des Communes Forestières du Var : « l’instruction des demandes peut durer parfois une année. (…) On a sur nos territoires des zones agricoles qui n’en sont plus parce qu’elles sont bloquées administrativement. Il faudrait qu’on arrive tout de même à se sortir plus rapidement de toutes ces difficultés administratives. »
En fin de réunion, Francis Gillet, maire de Saint Julien le Montagnier, Président de la communauté de communes Verdon-Mont-Major a regretté la présence de seulement quarante et une communes sur cent cinquante trois que compte le département, sur un sujet aussi important que la préservation du foncier agricole . »Il faut vraiment que nous soyons mobilisés sur ces questions, car je ne suis pas sûr que tous les maires se sentent concernés. Nous sommes quatorze maires issus de l’agriculture, mais nous sommes beaucoup plus en territoires ruraux. Il n’existe pas de solution miracle. Nous devons nous mobiliser massivement. Défendre nos produits c’est bien. Mais garder les terrains pour les faire, c’est mieux ».
Les débats se sont clos vers 17H30
Pour de plus amples informations :
Téléchargez le livre blanc au format.pdf
Téléchargez la charte des territoires agricoles au format.pdf
Téléchargez la présentation powerpoint (1/2) de la réunion du 26 Avril 2010 au format.pdf
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