Quarante-huit heures après l’incendie de la cathédrale Notre-Dame, les dons affluent, et le gouvernement se met en ordre de bataille pour une reconstruction accélérée.
« Ordre de bataille », le mot n’est pas exagéré, puisque c’est le général Jean-Louis Georgelin, ancien chef d’état-major des armées, qui a été nommé par l’Élysée pour diriger les opérations de reconstruction de la cathédrale. Avec un objectif extrêmement ambitieux : rebâtir Notre-Dame en cinq ans.
Lors d’un Conseil des ministres exclusivement consacré à cette question, hier, le chef de l’État et le gouvernement ont acté un certain nombre de décisions. Ils ont d’abord fait le point sur les dégâts et l’état structurel de l’édifice, indiquant qu’un état des lieux est en cours, et que les « travaux d’urgence » débuteront dans les tout prochains jours, avec des opérations de « sécurisation et de consolidation ponctuelles ». Le gouvernement a donné des nouvelles rassurantes du patrimoine artistique de la cathédrale, qui a été pour l’essentiel préservé : les vitraux ont « globalement bien résisté », les grands tableaux, les grandes orgues et les sculptures ont été « épargnés par le sinistre », tout comme les reliques et œuvres d’art de la sacristie, préservées des flammes, « miraculeusement », note étrangement le compte-rendu du Conseil des ministres.
L’encadrement des dons
Plusieurs centaines de millions d’euros ont déjà été collectés ou promis, émanant de particuliers, de riches mécènes, d’entreprises, mais aussi de tous les niveaux de collectivité – communes, métropoles, départements, régions. Le gouvernement a mis en place un « portail commun » fédérant les quatre seuls et uniques établissements habilités à recevoir des dons pour la reconstruction : le Centre des monuments nationaux, la Fondation Notre-Dame/Avenir du Patrimoine à Paris, la Fondation du patrimoine et la Fondation de France. Un projet de loi a été soumis dès hier au Conseil d’État et sera présenté lors du prochain Conseil des ministres pour encadrer cette levée de fonds d’ampleur assez inédite.
Hier, le ministre chargé des Collectivités territoriales a annoncé via twitter une décision importante pour les collectivités : « Avec Jacqueline Gourault et Gérald Darmanin, nous avons décidé que les dons des collectivités locales seront comptabilisés en dépenses d’investissement, et non de fonctionnement. » Pour certaines collectivités, dont les dons peuvent atteindre plusieurs millions, voire dizaines de millions d’euros, l’annonce est importante dans le cadre de la maîtrise obligatoire de la hausse des dépenses de fonctionnement.
Selon le président de l’Assemblée des départements de France, Dominique Bussereau, le gouvernement se serait également engagé – oralement – par la voix du ministre de la Culture, Franck Riester, à créer « un fonds de concours » spécifique pour récolter les dons des collectivités. Les élus « attendent les modalités de la mise en œuvre de cette annonce », écrivait hier Dominique Bussereau. Celle-ci n’a pour l’instant pas été confirmée officiellement. Seule certitude : deux fonds de concours différents ont été ouverts hier, par décret du ministre de l’Action et des Comptes publics, Gérald Darmanin – l’un pour les dons venant de France et l’autre pour ceux venant de l’étranger.
On a enfin appris hier que la gestion de ces dons se ferait sous le contrôle d’une commission ad hoc qui sera présidée par Didier Migaud, Premier président de la Cour des comptes, et composée des présidents des commissions finances et culture des deux chambres.
La question des assurances
D’autres questions sont ouvertes et mettront sans doute un certain temps à trouver une réponse. L’une d’entre elle a été posée hier par Jean-Luc Moudenc, le maire de Toulouse, sur France info : qu’adviendra-t-il des sommes collectées si leur montant dépasse le coût du chantier de reconstruction. Le président de France urbaine a estimé qu’il serait « normal » que ce reliquat soit ensuite redirigé vers les communes pour les aider à restaurer leur patrimoine.
Par ailleurs, c’est plus largement la question, précisément, des moyens des collectivités locales et de l’État alloués à la préservation et la sécurisation des monuments historiques qui devra être posée, afin que de telles catastrophes ne se reproduisent pas. Sans compter la question des assurances : beaucoup ont été fort surpris d’apprendre, après la catastrophe, que Notre-Dame n’était tout simplement pas assurée contre l’incendie – ou plutôt, qu’elle l’est directement par l’État, puisque celui-ci, propriétaire de l’édifice, est son propre assureur.
L’occasion de rappeler que les communes sont propriétaires des bâtiments cultuels situés sur leur territoire et édifiés avant 1905 et qu’à ce titre, elles doivent les assurer. La circulaire ministérielle du 29 juillet 2011 rappelle que « au vu des responsabilités que les collectivités publiques (…) encourent en qualité de propriétaires d’un ou de plusieurs édifices du culte et des risques de se voir exposer à des frais importants en cas de sinistre, il est indispensable qu’elles souscrivent, d’une part un contrat d’assurance couvrant les dommages concernant les bâtiments et les biens mobiliers qu’ils contiennent (incendie, dégâts des eaux, bris de glace, vol, vandalisme, catastrophes naturelles, etc.) ». Le même texte précise néanmoins que si la responsabilité de l’affectataire (diocèse) est établie, la commune propriétaire pourra se retourner contre lui. Il est donc également conseillé aux affectataires de « souscrire une police de responsabilité civile ».
© sources : Mairie Info (www.maire-info.com) – 18/04/2019