Le 16 décembre dernier, une centaine de premiers magistrats a répondu présent à l’invitation de l’Union Régionale des Maires PACA et participé aux débats de la deuxième journée régionale des maires organisée sur le thème de la réforme territoriale et du dialogue entre les communes et la Région. L’occasion pour eux de livrer leurs inquiétudes sur l’avenir de leurs territoires dont ils prédisent au mieux le démantèlement, au pire la disparition pure et simple. Répartition des compétences et schémas prescriptifs régionaux étaient au menu de la première partie des discussions. Les débats se sont ensuite concentrés sur le montage financiers des projets locaux.
La région, loin et proche à la fois
En préambule, le Président de La Région Provence Alpes Côte d’Azur, M. Michel VAUZELLE a remercié les élus de leur présence pour cette nouvelle journée de travail et a estimé que, suite au succès de la précédente journée des maires organisée en 2012, une nouvelle rencontre pouvait permettre, dans un contexte législatif et territorial en évolution continue, de prolonger les réflexions et les analyses des débats précédents. « Je souhaite que les maires puissent s’inscrire dans une dynamique de dialogue constant avec les services de la Région. Cette Région que certains maires estiment à plus d’un titre éloignée de leurs préoccupations, à la fois géographiquement et en terme d’accompagnement pour le montage de vos projets. Cette situation mérite examen et doit pouvoir évoluer favorablement. La réforme territoriale souhaitée par le gouvernement nous engage à créer du lien et à renforcer nos partenariats, tout comme elle doit nous permettre de soutenir les initiatives locales, favoriser le développement harmonieux de territoires mieux organisés, mieux structurés, mieux administrés aussi. Je souhaite que, par l’intermédiaire de votre Union Régionale dont je salue les travaux, vous puissiez être tenus informés des évolutions qui vous concernent dans le cadre du nouveau contrat de Plan que nous venons d’adopter en séance plénière de l’assemblée régionale pour la période 2015-2020. «
Ce nouveau contrat de plan sera articulé autour de cinq grandes thématiques : l’Enseignement supérieur (dont la vie étudiante), la recherche et l’innovation, les filières d’avenir et l’usine du futur, la mobilité multimodale, la couverture du territoire par le très haut débit et le développement des usages du numérique ou encore la transition écologique et énergétique, sur laquelle M. Jean-Pierre VERAN, Président de l’Union régionale des Maires PACA et Maire de Cotignac fonde beaucoup d’espoir pour l’avenir : « La transition énergétique est la conséquence du meilleur de ce que nous avons pu tirer du Grenelle environnement. C’est une approche des territoires qu’il nous faut intégrer convenablement, notamment pour la relance de nos bâtiments. C’est un levier d’actions considérable, créateur d’emplois, qui est réclamé par nos administrés, quelles que soient leurs sensibilité. C’est important. Nous pouvons bénéficier de prêts importants si nous allons dans ce sens. Il faut jouer le jeu parce que c’est dans l’intérêt du développement de nos territoires ».
Les enjeux de la réforme territoriale : quelles évolutions pour notre région ?
Pour M.Norbert NOURIAN, Délégué général du Centre d’études économiques, politiques et sociales, la réforme a été conçue pour dessiner ou redessiner un territoire. « Dit comme cela, cela parait simple, mais tout ou presque appelle au questionnement : « Réformer pour faire quoi? pourquoi affirmer le chef-de-filat de la Région? Que faut-il craindre du caractère prescriptif des schémas régionaux? Toutes ces questions, il n’appartient pas seulement au législateur d’y répondre. Vous, les maires, êtes les acteurs du réenchantement des territoires. Demain, c’est-à-dire maintenant, tous les ensembles constitués ou en devenir doivent pouvoir trouver une solution pour s’agréger et accélerer le développement économique, qui est à la base des groupements métropolitains. Le couple Région/Groupe communal va largement évolué dans un contexte de contractualisation dans lequel chaque collectivité trouvera avantage. »
Un sentiment partagé par M.Bernard JASSAUD, Vice-président de la Région délégué à la réforme territoriale, pour qui la contractualisation Région-Territoires prendra tout son sen, notamment au niveau de pays remusclés, élargis et renforcés : « les schémas prescriptifs donnent un cadre et des obligations, mais si c’est seulement un cadre, on n’arrivera pas à travailler ensemble. La contractualisation permettra de mettre en place un schéma régional des compétences partagées. Ce qu’il fallait craindre de la réforme, c’est cette notion de « prescriptivité » qui aurait pu s’exercer au travers non pas de la notion de comptabilité mais de conformité, qui aurait nié la spécificité des territoires et empêché la mise en oeuvre d’une politique différenciée. »
Montage des projets (1/2) : faire coïncider le projet à une réalité économique
Pour illustrer le volet « financement des projets », la parole a été donnée aux partenaires historiques des élus en Région : la Caisse des Dépôts, l’Etablissement Public Foncier et la SAFER.
Pour Mme Elisabeth VIOLA, Directrice régionale PACA de la Caisse des Dépôts et consignations, la crise économique a tout de même eu une vertu : celle de repenser les modalités de collaboration entre les maires et leurs financeurs. « Rien que pour le logement social, dossier prioritaire en PACA, la caisse des dépôts a injecté 600 millions d’euros. Nous prenons le risque de vous accompagner sur des projets mixant croissance verte et réhabilitation et ce malgré les incertitudes de l’avenir, car nous croyons en cette filière et à ses retombées économiques immédiates ».
Car désormais – et les maires présents dans la salle l’auront bien compris – plus de financement sans réalité économique du projet : « Nous devons ce langage de vérité aux élus. Il n’y aura pas de problèmes d’argent si les projets ont une finalité économique mesurable. Notre ADN, c’est l’octroi des meilleurs solutions de financements pour les projets à fort potentiel économique. S’il n’y a pas de retombées, il n’y aura pas de projet de notre côté ».
Dans la salle, le discours est moyennement apprécié, notamment par le Conseiller Régional et Maire de la Seyne-Sur-Mer, M. Marc VUILLEMOT : « Un projet doit -être rentable pour trouver des financements : OK, jusqu’ici, rien d’anormal ou de particulièrement scandaleux qui puissent nous heurter. Mais lorsqu’un équipement sportif ou culturel nécessite des réparations importantes, lorsque les communes ne peuvent pas financer les travaux parce que leurs capacités d’autofinancements sont trop faibles et leurs marges de manoeuvre atrophiées, lorsque le monde bancaire ne nous suit pas… si la caisse des dépôts fait la même chose, on fait comment? »
Autre réaction, celle de M. André ROUSSET, Maire de LAURIS : « On nous invite à nous rassembler avec les communes les plus riches. Moi, ma commune est très pauvre, mais elle est riche de son passé, de sa géographie, de sa typographie. Ses critères là sont sacrifiés sur l’autel de l’économie, de l’argent roi, maître de tout. Si l’argent est la seule motivation de nos regroupements, cela ne sert à rien, car l’argent, il n’y en a plus ».
Si en plus, on nous impose la métropole sans me demander mon avis, je me demande bien à quoi je peux servir« , a surenchéri M. Christian BURLE, Maire de PEYNIER : « La commune, ça fonctionne. L’interco aussi. Mais avec la métropole, on aura l’emprise sur rien. Nos budgets, nous les gérons en bon père de famille. La métropole nous enlèvera cette prérogative. Vous ne nous enleverez pas cela.
A la tribune, le médiateur de la Région a ajouté « qu’il avait bien compris que les maires des Bouches du Rhône étaient largement hostiles à la Métropole ». Pourtant M. Jean-Louis CANAL, Maire de ROUSSET a voulu apporter une nuance au propos prononcés par ses collègues : « Etre contre cette réforme, c’est passer pour être archaïques. Mais je suis désolé : la métropole façon Sarkozy ou façon Hollande, c’est la même chose. Alors au même projet, les mêmes réponses. On nous dit : » Regardez comment Lyon et sa Métropole prospère… Mais Lyon est la plus riche des communes de sa Métropole. Chez nous, c’est l’inverse : Marseille est la plus pauvre. La dynamique de prospérité n’est pas la même. L’horizon n’est pas le même, les perspectives de développement non plus. Pas étonnant que les banques demandent des garanties quand il s’agit de nos territoires. »
« Mais quels risques prennent les banques?, alors que le Conseil Général et l’Etat garantissent déjà bon nombre de prêts », s’est interrogé M. Christian DAVID, Maire de Carnoules, « dès lors que le Conseil Général et l’Etat garantissent ou cautionnent les prêts et les emprunts, comme c’est souvent le cas aujourd’hui. On nous tient un discours de responsabilité, mais nous, les maires, n’avons pas échappé à nos responsabilités. Nos comptes sont réguliers. Lorsque nous engageons un projet, nous engageons toujours notre responsabilité. Nous sommes les premiers à prendre des risques, car nous seuls sont responsables ».
Pour Mme Claude BERTOLINO, Directrice de l’Etablissement Public Foncier de PACA, les financeurs ont une place à défendre, celle de leur capacité à s’adapter aux nouvelles organisations des territoires qu’ils prétendent financer : « Actuellement, notre collaboration, c’est 200 conventions pour plus d’1 milliard d’investissement. Nos interlocuteurs restent les communautés de communes et d’agglomérations et donc les maires. Nous avons d’ailleurs invité cette année des présidents de communautés à notre conseil d’administration, preuve de notre ouverture et de nos engagements envers les nouvelles structures organisatrices des territoires ».
Enfin, pour M. Marc WEILL, Directeur de la SAFER Provence-Alpes Côte d’Azur, la nécessité d’avoir une politique de préservation et de réservation du foncier pour le développement des projets agricoles est généralement bien comprise par les maires et se traduit par un important volume de conventions signées, qu’il s’agisse de Conventions d’Intervention Foncière (CIF), de Convention d’Aménagement Rural (CAR), de Convention de Mise à Disposition (CMD), d’Acquisitions foncières (à l’amiable, par préemptions) et d’Etudes de marché foncier : « Notre priorité, c’est l’installation d’agriculteurs : Grâce à l’intermédiation
locative, c’est-à-dire l’établissement de baux entre propriétaires et fermiers, la SAFER PACA a facilité
l’installation ou l’agrandissement d’exploitations sur le territoire des six départements. Nous disposons ainsi d’indicateurs de suivi sur les dynamiques foncières qui nous permettent de mesurer l’évolution de l’urbanisation, la consommation des espaces naturels, agricoles et forestiers et surtout, de disposer de repères clés pour définir votre politique d’aménagement et établir vos documents d’urbanisme. N’hésitez donc pas à nous contacter ».