Ce n’est pas encore le « Code de la rue », mais cela commence à y ressembler : le décret Pama (plan d’actions pour les mobilités actives) a été publié dimanche au Journal officiel. Il modifie plusieurs articles du Code de la route dans le sens d’une plus grande sécurisation des piétons et des cyclistes – et d’une plus forte répression contre les automobilistes incivils.
Cela fait dix ans que des associations se battent pour qu’existe en France ce qui existe, notamment, en Belgique : un véritable Code de la rue, qui s’ajouterait au Code de la route, avec la préoccupation de protéger les usagers les plus fragiles – vélos et piétons. Sans qu’elles aient réellement obtenu satisfaction, l’évolution réglementaire de ces dernières années fait toutefois avancer les choses : les zones 30, les zones de rencontre et autres contresens cyclables font aujourd’hui partie du paysage des villes.
Le décret du 2 juillet, publié dimanche, va encore un peu plus loin.
La mesure la plus emblématique est certainement l’article 5 du décret : « Lorsque la vitesse maximale autorisée est inférieure ou égale à 30 km/h, les chaussées sont à double sens pour les cyclistes sauf décision contraire de l’autorité investie du pouvoir de police. » Autrement dit, alors que jusqu’à maintenant l’installation de doubles sens cyclables relevait d’une décision volontaire du maire, c’est à présent l’inverse – du moins dans les zones 30 : les doubles sens sont de droit, et c’est les interdire qui relève d’une décision du maire.
Autre mesure : les vélos sont désormais autorisés à s’éloigner du bord droit de la chaussée, afin d’éviter le risque d’être heurtés par une portière de voiture qui s’ouvre. Parallèlement, il sera désormais autorisé de « chevaucher » une ligne continue pour dépasser un deux-roues en toute sécurité (à un mètre en agglomération et un mètre cinquante hors agglomération).
Dans les « sas », c’est-à-dire les espaces réservés aux cycles aménagés aux intersections à feux, les cyclomoteurs ne sont désormais plus autorisés de plein droit. Ils « peuvent » être autorisés par le maire.
En matière de stationnement, les règles vont changer radicalement. Concernant les motos et autres scooters, le stationnement sur le trottoir va être plus systématiquement verbalisé, et entre à présent dans la catégorie de « stationnement gênant » (soit une amende de 2e classe, 35 €). En 2e classe également dorénavant : le dépassement de la durée de stationnement autorisée en zone bleue (R. 417-3 du code de la route).
En revanche, l’addition sera beaucoup plus salée pour les automobilistes qui ne respectent pas certaines règles de stationnement et mettent les usagers plus fragiles en danger : entre à présent dans la catégorie « stationnement très gênant » (amende de 4e classe, 135 €) le stationnement sur les voies réservées au transport public, sur les places réservées aux handicapés et au transport de fonds ; sur les passages piétons. Ces règles sont valables pour tous les véhicules, y compris les deux-roues motorisés. Même punition pour les voitures (mais non les deux-roues motorisés) lorsqu’elles sont garées : sur les trottoirs, , les pistes et bandes cyclables, les voies vertes, devant les bouches d’incendie, et « sur une distance de cinq mètres en amont des passages piétons dans le sens de la circulation ».
La date d’entrée en vigueur de ces disposition est variable : la plupart d’entre elles sont entrées en vigueur dès hier, lendemain de la publication du décret. L’article concernant les double sens cyclables ainsi que celui concernant les sas entreront en application le 1er janvier 2016 ; toutes celles qui concernent le stationnement entreront en vigueur en même temps que la décentralisation et la dépénalisation du stationnement c’est-à-dire, en l’état actuel des choses, le 1er janvier 2016.
Pierre Serne, vice-président de la région Ile-de-France et président du Club des villes et territoires cyclables, a salué hier la publication de ce décret : « Ces dispositions visent à un meilleur partage de l’espace public et notamment de la voirie. Les rues et les places ne sont pas seulement des lieux où on circule mais des espaces où on séjourne. L’expansion de la voiture individuelle s’est faite aux dépens des autres fonctions urbaines et a privatisé l’espace public. C’est pourquoi ce décret, après le premier décret de la démarche du Code de la rue paru en 2008, est une nouvelle étape importante pour nous aider à changer la physionomie de nos villes. »
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