Taxe d’habitation, DGF, dotation d’intercommunalité : en commission, Jacqueline Gourault et Sébastien Lecornu s’expliquent

Auditionnés hier par la commission des lois du Sénat, Jacqueline Gourault, ministre chargée de la Cohésion des territoires et des Relations avec les collectivités territoriales, et Sébastien Lecornu, ministre chargé des Collectivités territoriales, ont été interrogés sur plusieurs dispositions inscrites dans le projet de budget pour 2019. Les interrogations concernant les pistes visant à compenser la suppression de la taxe d’habitation, l’évolution et les variations des dotations ainsi que la réforme de l’intercommunalité ont notamment été évoquées.
Face à la « puissance déstabilisatrice » générée par la suppression annoncée de la taxe d’habitation, le président de la commission, Philippe Bas (LR), a demandé aux deux ministres comment ils s’y prendraient « pour éviter une déstabilisation des finances locales ».
Aucune réponse définitive pour l’heure si ce n’est la confirmation par Jacqueline Gourault que «tout doit être bouclé avant l’été » et qu’aucune hypothèse visant à compenser la suppression de la taxe d’habitation n’était « écartée », notamment celle proposant le transfert du foncier bâti des départements vers les communes.
« Mais il n’y a pas 36 solutions : le transfert d’impôt d’une collectivité à une autre ou le partage d’un impôt national », a-t-elle assuré, avançant toutefois que, « à titre personnel », elle était « d’accord sur le fait que plus la collectivité est proche des citoyens, plus elle mérite d’avoir une capacité de taux ».

Dotations : pas de réponse sur le fonds de lissage réclamé par l’AMF
Suivant un amendement adopté par les députés en première lecture (lire Maire info du 31 octobre), Sébastien Lecornu a confirmé qu’il était « favorable à ce qu’on puisse expliquer les variations significatives des dotations de l’État aux collectivités locales avec une notification construite à l’attention des élus locaux qui précisera les raisons de ces variations ».
Afin « d’éviter à certains démagogues de dire n’importe quoi », le ministre prévoit d’intégrer « un petit texte », lors de la publication de la répartition des dotations, « qui permet d’expliquer aux élus locaux ce pour quoi la dotation évolue », reconnaissant qu’il était « bien en mal de comprendre [lui]-même les notifications de l’État » dans ses « propres collectivités ». Il a toutefois convenu qu’il ne « faudra pas confondre vitesse et précipitation car cela demande beaucoup de travail ».
Concernant la demande formulée par l’AMF de créer de manière urgente un fonds de lissage, financé par l’État, en faveur des communes dont les dotations de péréquation ont connu une forte baisse en 2018, Sébastien Lecornu a botté en touche mais a laissé la porte ouverte à quelques jours du 101e congrès des maires. « Je vois bien l’idée, mais l’AMF ne dit pas comment elle le finance », a-t-il expliqué. « Il semble qu’il s’agirait de remettre de l’argent en plus pour le faire, donc il faudra en discuter […] lorsque l’AMF retrouvera le chemin du ministère de la Cohésion des territoires et des Relations avec les collectivités… »
L’association précise, ce matin, qu’elle a proposé de financer le dispositif en « reversant dans la DGF les montants correspondant aux prélèvements opérés sur les douzièmes de fiscalité des collectivités dont la dotation est nulle en raison des baisses de dotation appliquées entre 2014 et 2017 ». « Ces prélèvements, qui continuent d’être effectués sur ces collectivités, sont, chaque année, transférés au budget national. En 2018, ces prélèvements se sont élevés à 62,5 millions d’euros, ce montant étant reconduit chaque année », ajoute l’AMF.

Dotation d’intercommunalité : les simulations « données en séance publique »
Comme lors de l’examen du budget à l’Assemblée (lire Maire info du 12 novembre), la réforme de la dotation d’intercommunalité, et notamment les mesures sur le coefficient d’intégration fiscale (Cif) comme critère, ont là aussi posé question à la commission. Pour le sénateur de l’Ardèche, Mathieu Darnaud (LR), « le CIF reste pénalisant pour les communautés de communes », bien qu’il y ait « du mieux », selon lui. « Nous sommes à mi-chemin. Il faut repenser cela de manière plus ambitieuse. Le sens de l’histoire est de supprimer le CIF comme critère car il a un effet pervers s’agissant des plus petites intercommunalités ».
Comme il l’avait fait à l’Assemblée, Sébastien Lecornu a défendu le fait que ce sont « les communautés de communes [qui] seront les grandes gagnantes des amendements [qui y ont été] adoptés ». A l’inverse, l’AMF a de son côté jugé, en début de semaine, que ces amendements « s’inscrivent dans les mêmes travers qui ont conduit au dysfonctionnement de la dotation d’intercommunalité depuis plusieurs années ». Le ministre a toutefois assuré que « tous les chiffres des simulations en gain et en perte seront donnés » en séance publique avant de réaffirmer que « ce qu’on a trouvé là c’est le meilleur point d’équilibre ». Ce « dispositif transitoire » devrait cependant être « rediscuté à l’occasion de la réforme de la fiscalité locale ».

A.W.

Regarder l’audition.


© sources : Maire Info (www.maire-info.com) – 15/11/2018

© Illustration : DAKIN Communication Globale (www.agencedakin.com)