À Albi, vendredi, Édouard Philippe a confirmé le dépôt du projet de loi sur le statut de l’élu « avant la fin juillet », dont il a confirmé le nom : « Proximité et engagement ». Objectif de ce texte : « Dégager la vue des maires avant les prochaines élections municipales », sur un certain nombre de sujets. Les contours de ce texte commencent donc à se dessiner.
Gouvernance des EPCI
Le gouvernement souhaite « replacer le maire au cœur de l’action publique locale », sans toutefois « remettre en cause l’intercommunalité », a détaillé Édouard Philippe vendredi. Si certaines intercommunalités, même de grande taille, « fonctionnent très bien », d’autres connaissent « beaucoup de difficultés ». Il faudra donc « peut-être ajuster certains périmètres ou réaménager des ensembles tellement vastes qu’ils en sont devenus flous ». Selon une version du texte à laquelle a eu accès le quotidien Le Monde, dont il a rendu compte dans son édition de samedi, il deviendrait possible à des intercommunalités « XXL » de se scinder en deux, voire plus, « dès lors qu’une majorité de communes en est d’accord ».
Le gouvernement veut aussi revoir la gouvernance des EPCI, par exemple, a dit le Premier ministre, en introduisant en début de mandat « une discussion systématique sur le pacte de gouvernance ». Le projet de loi proposera « une boîte à outils », allant de la constitution de « conseils de maires » à celle de « conférences territoriales qui pourraient participer à l’élaboration ou à la mise en œuvre de certaines politiques publiques ». Édouard Philippe a également mentionné « la garantie pour les maires des petites communes rurales de siéger de manière systématique dans les organes délibérants, y compris en cas de changement d’exécutif » ou « la possibilité de déléguer aux adjoints aux maires le soin de siéger dans les commissions de l’EPCI », « y compris s’ils ne sont pas formellement conseillers communautaires ».
Sur le très sensible sujet de la compétence eau et assainissement, le Premier ministre a, pour la première fois, ouvert une porte à davantage de souplesse : « On pourrait imaginer que l’EPCI délègue, s’il le souhaite, la compétence eau et assainissement aux communes qui le demandent. » Après avoir rendu obligatoire le transfert de cette compétence aux EPCI, le gouvernement envisage donc d’autoriser un transfert inverse. On peut se demander s’il n’eût pas été plus simple de conserver, dès le départ, le caractère facultatif de ce transfert.
Pouvoir de police et exercice du mandat
Autre mesure annoncée par le Premier ministre : « L’élargissement du pouvoir de police du maire », avec un exemple : « Lui permettre d’envisager des suites plus contraignantes qu’à l’heure actuelle à des situations qui pourrissent la vie d’une rue ou d’un quartier en raison de l’occupation durable du domaine public ».
Il s’agira aussi de « reconnaître, accompagner et sécuriser l’exercice du mandat de maire », avec « des réponses très concrètes à des questions comme la relation avec l’employeur, la formation, la protection fonctionnelle ». Selon Le Monde, le projet de loi proposerait d’ouvrir « un droit universel au remboursement des frais de garde pour les élus ayant des enfants en bas âge » ou encore le remboursement des frais de transport et d’hébergement pour « tous les élus d’EPCI ».
Le Premier ministre est plus précisément revenu, dans son discours, sur « le droit à la protection fonctionnelle », dont selon lui « le maire doit pouvoir bénéficier sans avoir besoin de solliciter une délibération de son conseil municipal ». Afin de garantir ce droit, Édouard Philippe a dit souhaiter que « l’État finance l’assurance que sont susceptibles de pouvoir prendre les petites communes rurales ».
Enfin, le Premier ministre a annoncé l’intention du gouvernement de « regarder en face » la question des indemnités, sans donner aucun chiffre et en précisant que Sébastien Lecornu en discuterait avec « l’ensemble des associations d’élus ». Dans Le Monde, en revanche, des éléments chiffrés sont donnés : d’après le quotidien, le gouvernement aurait l’intention de « fusionner les régimes indemnitaires des trois premières strates de population », c’est-à-dire de créer un régime unique pour toutes les communes de 1 à 3 999 habitants, aligné sur l’actuel régime des communes de 1000 à 3 999 habitants. Ce qui signifierait que les indemnités mensuelles brutes des maires de très petites communes pourraient passer à 1 672,44 euros (contre, depuis le 1er janvier dernier, 661,20 euros pour les maires de communes de moins de 500 habitants et 1 205,71 pour ceux des communes entre 500 et 999 habitants).
Répétons-le, ces informations ne sont nullement officielles, elles n’ont pas été confirmées par le gouvernement et, dans les rencontres préparatoires que l’AMF a eues avec les cabinets de Jacqueline Gourault et Sébastien Lecornu – encore vendredi dernier – aucun chiffrage de cet ordre n’a été livré.
Il faut donc maintenant attendre qu’un texte officiel soit transmis aux associations d’élus pour confirmer ou infirmer ces informations… et pouvoir se poser la question essentielle : qui va payer ? Car on le sait, si les indemnités des élus font partie des dépenses obligatoires des communes, le dispositif de la dotation élu local est prévu pour aider les plus fragiles d’entre elles à assumer ce type de dépenses. Le gouvernement, s’il entend réellement largement revaloriser les indemnités des maires des petites communes, va-t-il augmenter dans la même proportion la dotation élu local (65 millions d’euros cette année) ? Il n’y a aucune réponse à ces questions pour l’instant.
© sources : Mairie Info (www.maire-info.com) – 17/06/2019